LES LOCQUETS
Le bruit qu'ils font (cloc!... Cloc!...) n'est pas désagréable. St-Gelay, poète du XVIIè s. disait à propos de ces fermetures : "Voulez-vous que je vous dise quel instrument a le plus de mélodie
? C'est à mon gré le loquet d'une porte". Et sans être particulièrement sensible à ces choses, entre nous, il y en a …. de fort beaux.
LE LOQUET (de l'anglo-saxon LOC verrou) est cité dans les anciens textes français dès le XIIè s. sous le diminutif LOC, couramment utilisé au Moyen-Âge. Viollet-le-Duc dans son dictionnaire
raisonné de l'architecture française du XIè au XVIè s., au chapitre serrureries, nous donne un remarquable exemple de loquet datant du XIVè s. relevé sur la porte d'une maison de St-Antonin (Tarn
et Garonne).
On peut encore voir quelques beaux spécimens de loquets à poucier du XVIè au XVIIIè s. dans le Musée de la Ferronnerie " Le Secq des Tournelles " à Rouen.
Les différentes sortes de loquet
Dans sa définition, le loquet est un organe de fermeture très simple que l'on met généralement aux portes qui n'ont pas de serrure.
Il existe plusieurs sortes de loquets, de forme différente selon leur destination : fermeture d'un vasistas, d'un placard, de persiennes, à va-et-vient, à billes d'acier, etc…
Mon choix s'est orienté uniquement sur les loquets de portes, avec une prédilection pour les 'loquets à poucier' ou 'clenches à pouce', dont le fer mince de la platine se prête à une infinie
diversité décorative, en plus des modèles désormais classiques du XVIIème et XVIIIème siècles maintes fois copiés. C'est dans le milieu rural où la modernité n'a pas encore trop pénétré, qu'elles
sont les plus nombreuses, bien que leur utilisation ait été plus tardive que dans le milieu urbain : en effet jadis, dans nos campagnes, l'on fermait les portes au moyen d'une petite pièce de
bois mobile que l'on appelait " la bobinette " ou autres fermetures rudimentaires.
Dans certaines régions les loquets ont presque disparu, c'est le cas de la Normandie et de la Bretagne. En revanche la Bourgogne, la Touraine, le Poitou-Charentes, la Saintonge, la Dordogne,
l'Auvergne, la Gascogne, le Berry, etc… en comptent encore un assez grand nombre.
Cependant, il ne faut pas croire que toutes ces pièces de quincaillerie encore en place ont toutes traversé les années sans dommage ; beaucoup sont abîmées, rongées par la rouille, les parties
les plus fragiles sont parfois détruites ou ont fait l'objet de réparations de fortune (à la campagne on ne jette rien).
Toutes les pièces que nous possédons ont été récupérées dans les brocantes, les vide-greniers, chez les ferrailleurs, parfois dans une décharge ou dans un roncier parmi les décombres d'une
masure. Un peu partout ces loquets sont remplacés lors de rénovations par des fermetures mieux adaptées au temps présent.
Bien que fabriqués le plus souvent par le maréchal ferrant ou le forgeron de l'endroit à l'intention de gens de condition modeste et peu exigeants, chaque artisan a toujours eu le désir d'en
faire plus que ce qu'exige la mise en forme de la pièce, l'envie d'apporter, même si l'on relève quelques imperfections, un enjolivement à son travail sous forme d'un fleuron, d'un lobe, d'une
volute etc…
Chaque petit décor, si sobre soit-il, est une œuvre de création individuelle que l'industrialisation a fait perdre.